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Le blog de Marc Jammet.

Vitaminer la gauche ou la réinterroger?

29 Mars 2011, 18:07pm

Publié par Marc Jammet

20110330Vitaminez

 

"Fatigué de la crise? Vitaminez la gauche".

 

 

Ce slogan d'une affiche du PCF des dernières élections régionales est tout d'abord choquant.

Par millions en France, nous ne sommes pas seulement "fatigués de la crise" mais nous perdons nos emplois, nos salaires baissent, nos conditions de travail se dégradent, notre couverture sociale se délite, notre santé est bradée au privé …

La crise (du capitalisme - formule oubliée dans l'affiche?) ne nous fatigue pas, on en crève!

Et plus encore dans le reste du monde où par centaines de millions, les enfants, les femmes et les hommes "vivent cette crise pour en mourir".

 

Cette crise, suffira-t-il de "vitaminer la gauche" pour en sortir? Non seulement rien n'est moins sûr mais, à mon avis, cette formule est un piège.

 

La gauche a une histoire … française.

 

 

Car la gauche, c'est avant tout - historiquement - la place qu'ont occupée à l'assemblée nationale les premiers députés de la Révolution française.

Pour aller vite, à droite les tenants de la monarchie (constitutionnelle ou pas), à gauche les tenants de la République (bourgeoise ou pas).

 

Ces députés n'ont pas été mandatés par leurs électeurs pour se placer ici ou là. Ils le font, une fois élus, en considération de leur rapport au pouvoir et des rapprochements qui leur semblent nécessaires pour pouvoir peser sur les décisions.

 

Dès le départ, la gauche est donc essentiellement le fait d'élus et elle ne se positionne pas pour ou contre un capitalisme naissant, voire encore moins, sinon à la marge (Gracchus Babeuf), pour une autre alternative.

Et, dès le départ également, les tenants du capitalisme (ou de la bourgeoisie) se retrouvent autant à gauche (République bourgeoise, suffrage censitaire) qu'à droite (recherche d'une réforme de la monarchie à l'instar de qui s'est fait en Angleterre un peu plus d'un siècle auparavant).

 

Autrement dit, la gauche ne s'est jamais définie comme un "appareil de valeurs" claires mais par son double rapport au pouvoir et au fait électoral pour, quoi qu'on en dise, "gérer la société".

 

 

Ne pas faire dire à la gauche ce qu'elle ne dit pas.

 

 

Dès lors, vouloir faire dire à la gauche ce qu'elle ne dit pas est dangereux.

Tout au long de son histoire, en France, en Europe et dans le monde, la gauche ne s'est jamais définie comme une force voulant construire une autre société mais plutôt comme un regroupement essentiellement électoral, souvent disparate du point de vue de ses objectifs.

Et ce n'est par hasard si les faits marquants de la gauche pour les citoyens français se résument souvent à: 1936, programme commun, 1981 - autant d'échéances électorales dans la perspective immédiate du pouvoir.

 

 

La gauche, c'est aussi ….

 

 

Bien entendu, il y a des valeurs plutôt portées par la gauche dans notre société: les aspirations à la liberté, à la justice, à l'égalité.

Mais c'est aussi au nom de ces valeurs que la gauche française - au lendemain de l'époque napoléonienne (soutenue massivement par la gauche d'alors - voir Victor Hugo et son "Napoléon le petit" pour qualifier Napoléon III) s'engage dans la colonisation pour propager "la liberté et la civilisation" alors que la droite d'alors - en opposition à ces mêmes valeurs d'ailleurs - s'y oppose.

C'est aussi en prenant prétexte de préserver ces valeurs - "autant que faire se peut" suivant le contexte historique - qu'à gauche, le parti socialiste vote les crédits de guerre puis participe au gouvernement lors de la première guerre mondiale, que le ministre socialiste Sérol condamne à mort les citoyens "coupables d'activités communistes" en avril 1940, que François Mitterrand (après avoir occupé la place de secrétaire d'état dans le gouvernement Pétain jusqu'en 1942) lance son fameux "l'Algérie c'est la France".

La gauche, c'est aussi le Parti radical - l'un des trois piliers du Front populaire de 1936 qui dès 1937, gouverne avec la droite et refuse, après Blum, toute intervention militaire en Espagne contre Franco et les nazis. Le Parti radical est aujourd'hui dirigé par .. Jean-Louis Borloo.

La gauche actuellement, c'est aussi dans de nombreux pays des gouvernements "gérants loyaux du capital' - Espagne, Portugal, Grèce .. - voire même attentatoires aux libertés - Côte d'Ivoire, Tunisie, Egypte dont les partis gouvernementaux sont ou étaient très récemment membres de l'internationale socialiste.

La gauche en France actuellement, c'est aussi Dominique Strauss Kahn - directeur du FMI -, Manuel Valls - remettant en cause l'idée même des 35 heures -, Martine Aubry - "créatrice des 35 heures" en échange de l'intensification de la productivité et de la flexibilité des emplois et des salariés, Claude Evin - directeur de l'ARS d'Ile de France qui ferme à tour de bras nos services hospitaliers pour mieux en faire profiter le secteur privé …

 

 

Oui mais ça, ce n'est pas la gauche?

 

 

J'entends bien qu'ici ou là, et singulièrement à la direction nationale du PCF, on nous dit "oui mais cela, ce n'est pas la gauche" tout en gérant loyalement la majorité des conseils régionaux ou généraux à direction PS, les municipalités de Paris et Lyon …

 

Oui mais, si cela ce n'est pas - aussi - la gauche, alors il reste quoi à gauche? Plus un seul gouvernement (Cuba, le Vietnam, le Pérou, la Bolivie étant présentés comme des dictatures) … le Front de gauche et le NPA en France? Ce n'est pas très sérieux!

Contrairement à ce qu'on voudrait nous faire croire, il ne s'agit pas d'opposer "les bons" et "les mauvais" (que certains appellent même à exclure du PS) mais de la détermination ou non à rompre avec le capital.

 

 

 

Le PCF est à gauche mais il n'est pas "soluble" dans la gauche.

 

 

Cela ne signifie pas que droite et gauche ce soit du pareil au même. Mais la gauche est extrêmement diverse et le rapport de forces politiques en son sein fait qu'elle ne se prononce pas pour changer la société.

 

D'où l'utilité d'un PCF - à gauche mais qui ne s'y réduit pas tout simplement parce qu'il porte un projet de société, de rupture - actif à partir des besoins des gens, soucieux d'aider à la prise de conscience de classe sur les sources des difficultés rencontrées et de construire une alternative: une société socialiste.

Cela n'empêche pas les accords électoraux - à gauche -; cela n'exclut pas à priori une éventuelle participation à un gouvernement de gauche (pas plus que cela ne l'y oblige dès lors qu'il estime que les conditions ne sont pas créées au vu de son objectif) mais cela engage les communistes à un déploiement sans précédent en direction d'abord des salariés, des citoyens pour débattre, agir pour comprendre, comprendre pour agir. Cela engage donc les communistes non seulement à préserver leur parti mais à le renforcer en se gardant de toute position électorale opportuniste.

 

Et la présidentielle dans tout cela?

 

 

Au fond, pour ce qui concerne la prochaine présidentielle, le débat ne serait-il pas plus clair (et plus honnête) si nous l'envisagions sous l'angle de l'utilité d'une candidature communiste porteuse d'un programme communiste?

Une candidature utile à notre projet de changement de société plutôt que de "ahaner" vouloir changer la gauche avant le 1° tour en prévoyant d'ores et déjà, sans le dire ouvertement, de participer à un gouvernement "de gauche" qui gérera loyalement le capitalisme et nous discréditera une fois de plus?

Comme l'écrivait déjà François Rabelais au XVI° siècle: "science sans conscience". (de classe? NDL) n'est que ruine de l'âme

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P
<br /> Bonjour Marc et comme Caroleone l'a justement dit, sois le bienvenu dans le petit monde de la spirobulle.<br /> <br /> Bon, j'ai encore gaffé, j'ai répondu à ce texte sur le blog de Caroleone !<br /> <br /> <br /> Amitiés fraternelles,<br /> Le Papy<br /> <br /> <br />
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C
<br /> Bienvenue au club OB mon cher camarade Marc, c'est chouette, on va pourvoir partager.<br /> Je t'embrasse bien fort<br /> caroleone<br /> <br /> <br />
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