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Le blog de Marc Jammet.

L'Humanité. Quand la masturbation donne un coup de main à l’évolution

16 Juillet 2023, 07:35am

Publié par Marc Jammet

Quelle fonction l’onanisme a-t-il dans la théorie de Darwin ?

Bien que solitaire, la masturbation servirait en fait des intérêts collectifs et aiderait à faire évoluer les espèces.

C’est ce que vient de démontrer une étude à ce sujet réalisée chez les primates.

Des études ont déjà montré que le comportement autosexuel, ou masturbation, est courant dans l’ensemble du règne animal. Toutefois, il apparaît être particulièrement répandu chez les primates. La stimulation génitale, renforcée par la recherche de plaisir en solo ou avec d’autres, semble être le moteur évident et principal de cette pratique. Le bénéfice individuel apparaît immédiat mais qu’en est-il du bénéfice collectif ? À un niveau superficiel, la masturbation pose un problème pour la théorie de l’évolution…

« L’onanisme n’augmente pas directement les perspectives de survie et, par définition, se produit à l’exclusion des partenaires reproducteurs, tout en entraînant des coûts en termes de temps, d’attention et d’énergie », explique un article récent de biologistes masculins et féminins de l’University College de Londres, en Grande-Bretagne.

Historiquement, la masturbation a été considérée « comme un comportement pathologique » ou « un exutoire sexuel nécessité par une forte libido »

« Par conséquent, la masturbation a été historiquement considérée, au pire, comme un comportement pathologique porté par des individus aberrants, et, au mieux, comme un exutoire sexuel nécessité par une forte libido. » Leur publication, qui analyse le plus grand ensemble de données jamais réuni sur la masturbation des primates, apporte des éléments qui montrent que ces considérations ne sont pas incompatibles avec l’idée que la masturbation a aussi une utilité collective. Elle aurait, aussi surprenant que cela puisse paraître, un rôle à jouer dans l’évolution. Pour cela, l’équipe de chercheurs a proposé deux hypothèses.

La première est celle de la « sélection postcopulatoire », qui prédit que la masturbation favorise les chances de fécondation. Selon les scientifiques, d’une part, l’excitation sexuelle provoquée par la masturbation masculine non éjaculatoire peut accélérer l’éjaculation ultérieure.

Cette excitation profiterait aux mâles de rang inférieur, susceptibles d’être interrompus pendant l’accouplement, et augmenterait la qualité de l’éjaculat. D’autre part, la masturbation masculine précopulatoire, éjaculatoire cette fois-ci, peut expulser des spermatozoïdes médiocres, améliorant ainsi la qualité de l’éjaculat lors de la copulation.

« L’excitation sexuelle pourrait également aider à expliquer la masturbation féminine, puisque l’excitation et l’orgasme peuvent faciliter le choix cryptique des femelles », expliquent les scientifiques. L’excitation féminine augmente le pH vaginal, créant un environnement plus hospitalier pour les spermatozoïdes.

Les sécrétions vaginales associées à l’excitation filtrent les spermatozoïdes inférieurs, tout en facilitant le transfert des spermatozoïdes de bonne qualité vers l’utérus. De même, les contractions associées à l’orgasme féminin peuvent améliorer le passage des spermatozoïdes dans la cavité utérine.

Chez les femelles, des choix pas si cryptiques

« Chez l’homme, les spermatozoïdes peuvent être viables pendant plus de cinq jours. Il semble donc probable que les primates femelles utilisent la masturbation pré- ou postcopulatoire comme stratégie destinée à faciliter la progression des spermatozoïdes et donc pour augmenter leurs chances d’être fécondées », expliquent les scientifiques. Par ailleurs, la masturbation pourrait également servir de forme d’affichage précopulatoire ou de comportement de parade nuptiale similaires aux expositions péniennes pratiquées chez les chimpanzés avant l’accouplement.

La seconde hypothèse évoquée par les chercheurs est celle de l’évitement des agents pathogènes. Elle propose que la masturbation masculine réduit le risque de contracter une infection sexuellement transmissible après la copulation en nettoyant l’urètre (un site propice à de nombreuses infections) avec l’éjaculat obtenu.

L’étude britannique montre ainsi que le comportement autosexuel remplit une fonction adaptative. « Il a un rôle à jouer dans l’ordre des primates, et est pratiqué par des membres captifs et sauvages des deux sexes », concluent les chercheurs. Loin d’être une boulette dans les branches de l’arbre phylogénique, la masturbation fait partie d’un répertoire de comportements sexuels sains, mais surtout nécessaires à l’évolution.

Le rôle des femelles dans la compétition spermatique a longtemps été ignoré par la nature même des chercheurs, essentiellement masculins. En effet, on pensait que les femelles n’avaient qu’un rôle passif dans la reproduction. Progressivement, l’idée selon laquelle le lieu de compétition spermatique (le tractus génital féminin) pouvait éventuellement donner la possibilité aux femelles d’agir sur la sélection du sperme a fait son chemin. C’est ce que l’on nomme le « choix cryptique ». Il décrit les processus pré- et/ou postcopulatoires amenant la femelle à favoriser le sperme d’un mâle au détriment des autres.

Pour draguer, les chimpanzés jouent les exhibitionnistes

À l’intérieur du groupe de chimpanzés, chaque mâle a accès indifféremment à toutes les femelles pour la reproduction, ce qui ne l’empêche pas de poursuivre aussi celles des groupes voisins qui sont réceptives. Certains chimpanzés exposent leur pénis de manière très ostentatoire. Huit fois sur dix, c’est le mâle qui s’approche de la femelle ; elle lui présente l’arrière-train et le rapprochement a lieu immédiatement, sans qu’il y ait aucune parade sexuelle. Mais il arrive parfois que ce soit la femelle qui prenne l’initiative en se mettant en posture d’accouplement devant un mâle, là encore en montrant ses parties génitales. Le rapport se déroule aussitôt et en quelques secondes.

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